Quand je suis tombé sur cette phrase d’Edgar Morin, je l’ai trouvée juste. En même temps j’ai trouvé qu’elle soulevait une question. En effet, elle est aussi l’indicateur d’un problème de société. Pourquoi « humaniser les relations » ?
En effet, être d’accord avec les propos du sociologue et philosophe, c’est admettre que nous condamnons plus aisément qu’on ne cherche à comprendre les personnes et le monde qui nous entoure.
« Mais bien évidemment André, disent certains autour de moi. Ainsi va le monde ! Quel naïf… »
Quand j’écoute les débats ou les médias, il est vrai qu’ils sont rares à nous inviter à prendre du recul et à réfléchir.
On n’écoute pas, on donne son opinion. Et si on n’est pas d’accord, on se fâche ou on change de sujet. La confrontation saine, dans l’assertivité, se fait rare.
Les médias aujourd’hui semblent être des outils de prise de position : pour ou contre. Seulement, attention, il faut être du bon côté pour espérer avoir sa place dans cette société.
Les arguments quantifiés, qualitatifs et vérifiables sont rares.
On leur préfère les discours émotionnels.

Mais avant d’aller plus loin, il serait peut-être juste de se rappeler ce que veulent dire ces quelques concepts :
Comprendre : Se faire une idée claire des causes, des conséquences.
Je n’ai pas le sentiment que mon entourage se fasse une idée claire des sujets de société. En général, ils alignent les illustrations qui peuvent justifier leur colère, leur fatigue, voire leur déni d’une réalité plus complexe. Mais, parfois aussi, ils se contentent d’exposer les éléments qui pourraient les dédouaner de leur responsabilité, si petite soit-elle.
J’ai pu constater aussi un besoin de légèreté accru : « Qu’est-ce que tu es sérieux ! Je m’ennuie avec tes sujets. Je n’ai pas envie de réfléchir »… Conséquence ? On évacue les sujets ou on se fâche car on n’a pas pris le temps de comprendre les propos ou les intentions de son interlocuteur. Pourtant comprendre n’est pas excuser. Pourquoi alors entrer dans la confrontation stérile ?
Condamner : Déclarer quelqu’un blâmable par un jugement de valeur sévère et énergique.
C’est un mot bien choisi, car souvent au-delà du jugement, il ne reste plus grand-chose et les arguments sont bien maigres parce qu’ils s’appuient sur des croyances, des propos rapportés ou bien souvent d’émotions fortes parfois à peine digérées. C’est ce à quoi nous pousse notre environnement : prendre position vite et bien. C’est là qu’une fois l’émotion qui nous a poussé à nous positionner dans l’urgence s’apaise que peuvent en apparaître d’autres. Celles-ci sont plus sournoises et difficiles à gérer. Je parle de la frustration, de la culpabilité d’avoir agi peut-être un peu trop vite.
Humanisation : Action de rendre (plus) humain
Je me pose une question sur ce concept : est-ce normal qu’il existe ? Quand et comment avons-nous cessé de nous indigner, révolter, insurger contre le manque d’humanité ?
Peut-être quand nous avons cru que nous étions meilleurs que les autres ou nous croyant à l’abri de leurs malheurs.
“Si nous savons comprendre avant de condamner, nous serons sur la voie de l’humanisation des relations…”
Edgar Morin / Les Sept Savoirs nécessaires à l’éducation du futur
Le pire auquel je pense à l’instant même où j’écris ces mots c’est que je me demande si quelqu’un se préoccupe encore de « l’humanisation des relations »… Est-ce grave ? C’est comme si aujourd’hui le fait d’humaniser les relations ne soit encore moins la préoccupation de qui que ce soit.
En effet, aujourd’hui, tout le monde appartient à un groupe. En tout cas tous ceux qui ont un fort pouvoir d’influencer notre société dans ce sens. L’appartenance forte a tendance à décomplexer les gens et à les inciter à se montrer tels qu’ils sont.
Ce n’est pas mal en soi. Le problème apparait quand on en perd son empathie, son pouvoir à se mettre à la place de l’autre comme si, tout à coup, le fait d’appartenir rendait tout-puissant. L’appartenance malsaine peut nous pousser à adopter des comportements inhumains, mais valorisés au sein même d’un groupe.
Un premier pas pour humaniser les relations
S’affirmer dans la relation, oui ! Appartenir à un groupe, bien évidemment !
Mais faut-il pour autant perdre notre humanité, notre empathie et oublier notre condition ?
Je pense que cela ne peut se faire qu’aux dépens de nos semblables à court terme et à nos propres dépens à moyen ou long terme.
Un premier pas pour humaniser les relations, c’est chercher à comprendre.
C’est vrai cependant que de nos jours comprendre veut dire pour beaucoup faire quelque chose. Si vous êtes dans ce cas, je vous invite à faire une seule chose : accueillir le silence et vous laisser faire plutôt que faire. Vous pouvez lire le silence dans la relation pour aller plus loin.

Bonne continuation !